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Université Lumière - Lyon 2, Université François Rabelais - Tours,
Terra Foundation for American Art, Musée des Beaux-arts de Lyon


 
Repartir à Zéro / Starting from Scratch
Art et culture en Europe et en Amérique, 1945-1949
Art & Culture in Europe and the United States, 1945-1949

Colloque international
International Symposium

Musée des Beaux-arts de Lyon
12 et 13 janvier 2009
January 12-13, 2009
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Mardi 13 janvier après-midi

14h : John KLEIN (Washington University, Saint Louis), Matisse back to square one in a game with new player


Cette communication examine la situation d’un des artistes français les plus renommés, Henri Matisse, dans la période suivant immédiatement la Seconde Guerre mondiale, à partir de l’idée d’une sorte de « retour ». Il est vrai qu’un artiste déjà célèbre avant la guerre ne peut rejeter tout ce qui l’a amené à la maîtrise de son art et à la renommée. Mais il ne faut pas croire pour autant qu’il peut poursuivre son objectif sans réexaminer ses moyens d’expression (je paraphrase ici la dichotomie qui sert de ligne de force à l’exposition). Peut-êtreà l’encontre de l’idée centrale de cette exposition et sa thématique d’un primitivisme fondamental, à savoir l’ouverture sur une infinité de possibles par le retour au néant, j’examinerai dans cette communication le tournant d’après-guerre dans l’art de Matisse non comme un retour à zéro, mais plutôt comme un retour à ses fondamentaux d’origine.
 Sa reconversion en concepteur et décorateur de grands projets environnementaux et architecturaux au milieu et à la fin des années 40 entraîna non seulement  dans son travail la fin de la dimension individuelle et une perte du contrôle absolu de l’artiste mais aussi l’adhésion à des principes décoratifs qui avaient animé son art aux débuts de sa longue carrière.

Pendant la guerre, Matisse perçut les possibilités offertes par le papier découpé, un moyen expérimental de production d’images qui se prête aussi bien à la reproduction qu’à une utilisation à grande échelle. En tant qu’outil de conception, le découpage permit à l’artiste d‘entreprendre des projets au-delà de ses capacités physiques et techniques (vitraux, peintures murales en céramique, tapisseries) et d’étendre le marché pour ses productions en permettant la reproduction du modèle sans utiliser les techniques classiques des beaux-arts comme la gravure ou le moulage en bronze (livres, tissus, foulards, tapis). Alors que Matisse s’engageait courageusment en territoire inconnu, les caractères d’authenticité et de simplicité du découpage manuel firent place à de nouveaux problèmes techniques qui l’obligèrent à renoncer à sa maîtrise absolue et à ce qu’il avait appris dans sa carrière. La collaboration devenait maintenant essentielle à l’accomplissement de ses objectifs. La peinture avait rempli sont rôle et ne lui était plus indispensable. Bien que n’étant pas le genre d’artiste à peindre au sol, ni à brûler sa toile ou à la déchirer avec des objets tranchants ou encore à la recouvrir de matériaux rappelant la terre, Matisse, cependant, en se débarrassant progressivement de la toile, remit en cause la confiance que les modernistes avaient en la peinture comme idéal.
Une telle remise en question n’eut pas lieu dans une sorte de vide culturel mais bien dans le contexte transatlantique créé par les conséquences de la Guerre. Sa confrontation avec les Etats-Unis fut pour lui un moyen de satisfaire son désir de pénétrer de nouveaux marchés et d’obtenir une nouvelle forme de mécénat. New-York apparaît ici non comme le point final d’un dialogue mais plutôt comme un point d’accès dans la machine économique américaine d’après-guerre, qui s’avéra être aussi capitale pour le retour de l’artiste à la décoration que pour celui de la France à une ère de stabilité.