LE COMMENTAIRE DE TEXTE HISTORIQUE
Le commentaire de document est un exercice d’initiation au métier d’historien, car il se rapproche du travail sur les sources (sources : documents qui servent à établir et à interpréter les faits historiques car les faits sont construits et non donnés).
Les documents sont variés, parmi ceux-ci les textes historiques seront privilégiés. Le commentaire de texte historique, qui n’est pas un commentaire littéraire, est une technique qui s’acquiert par la pratique. Se contenter d’assister aux exposés des autres étudiants puis à la reprise ne suffit pas. Il faut S’EXERCER, lire des documents, ce qui signifie au minimum lire les textes proposés pour chaque séance et y réfléchir (i.e. réaliser le cadrage et le travail d’analyse). Assister aux séances de T.D. sans avoir fourni ce travail de base est une perte de temps.
Il faut essayer d’apprendre à travailler en groupe pour se présenter des exposés, s’exercer sur des documents.
Comment réaliser un commentaire de document ? Deux défauts majeurs doivent être évités :
- la paraphrase : répéter (voire résumer) le texte
- considérer le texte comme un « prétexte » à un exposé plus ou moins général se rapportant au sujet abordé par le texte.
I/ La préparation du commentaire
1. Le travail préliminaire
- D’abord se mettre dans l’état d’esprit – fictif – de la recherche, i.e. ne pas juger le texte par rapport à ce qu’on croit savoir de la question. Se placer dans l’état d’esprit des contemporains, et donc prendre garde à l’utilisation d’éléments chronologiquement postérieurs au texte.
- Lire très attentivement le texte, plusieurs fois. Numéroter les lignes de cinq en cinq (y compris le titre quand celui-ci fait partie du texte).
- Souligner les termes, les expressions et les allusions qu'il faudra expliquer dans votre commentaire.
- Restituer le plan du texte.
- Dresser la liste des thèmes du texte, les regrouper et les hiérarchiser selon leur importance dans le document.
2. L’identification et l’analyse du document
a) La lecture du texte a constitué une première étape pour l’identification qui repose sur la présentation et les allusions du texte, les connaissances acquises par ailleurs.
Il faut préciser la nature du document qu’il faut parfois déduire de son contenu. La détermination de la nature du texte est importante car en découlent des indications sur la fonction et la portée informative de ce texte (un discours et un texte de loi n’ont pas la même fonction). Préciser si le texte est entier ou s’il a été coupé, s’il s’agit d’une traduction ou non...
L’auteur. Quand il est nettement individualisé il faut donner les précisions nécessaires pour éclairer le texte : s’il est connu on évitera les trop longs développements, les précisions inutiles à la compréhension. Mais souvent l’auteur est si peu connu que les informations que l’on possède à son propos proviennent du texte. Dans le cas d’un auteur anonyme (individuel ou collectif) il faut tenter d’identifier le milieu d’où il vient.
Le destinataire. Même observation que pour l’auteur. Son identification peut être importante car elle peut permettre de saisir l’objet du texte.
Date du document. Elle peut être indiquée par le texte ou par l’éditeur (ne pas confondre la date de publication et celle de la rédaction). Parfois l’indication est approximative et provient d’informations contenues dans le texte : le recours à des connaissances acquises est alors nécessaire.
Les circonstances de la rédaction peuvent induire une vision différente d’un événement par un même auteur (rédaction à chaud ou plus tard, dans des mémoires).
Le lieu. L’identification du lieu de rédaction peut être importante.
b) L’analyse du document consiste à expliquer et à critiquer grâce aux connaissances acquises les informations présentes dans le document et qui ont été soulignées au crayon lors des lectures successives. Ces informations peuvent être de plusieurs sortes :
- Des termes techniques (juridiques : « initiative des lois », « plébiscite » ...; économiques : « inflation » ...; des noms d'institutions, de partis politiques, de syndicats....)
- Des dates, des personnages.
- Des références à des événements historiques cités plus ou moins précisément dans le texte : événements politiques (guerres, révolutions, émeutes, fondations de partis politiques, grèves...) ; événements économiques et sociaux (crises économiques... ) ; diplomatiques (traités, incidents...), culturels (expositions, découvertes scientifiques...)
- Des références à des mouvements d'idées politiques, économiques ou culturels.
Dans tous les cas, il convient de :
- définir et expliquer ces éléments ;
- s'interroger sur la manière dont l'auteur les rapporte ou les décrit. Sont-ils exacts, authentiques ?
Mais, éviter de :
- faire une dissertation : il faut expliquer uniquement les éléments du texte (et non d'autres),
- être trop long dans l'explication de ces éléments : ne retenir que ce qui peut aider à la compréhension du document,
- apporter des informations postérieures à la date du document,
- porter un jugement de valeur, une critique personnelle ou anachronique le texte.
Ce travail effectué, il faut se détacher du texte pour passer à la synthèse et à la mise en forme.
1. Construire un plan
Le commentaire ne se réduit pas à une simple analyse linéaire du document car beaucoup de textes n’ont pas de plan ou un plan qui ne répond pas au même objectif que celui de l’étudiant en histoire. En outre, les extraits gomment le plan du texte.
- Le plan doit être précis et rigoureux, organisé en deux ou trois grandes parties (I, II, III), chacune d'elles étant structurée en sous-parties ( I.1, I.2, II.1, II.2...).
- Le plan doit être construit à partir des thèmes du texte et des matériaux réunis au cours des phases précédentes.
- Les grandes parties doivent correspondre aux thèmes principaux du document, les sous-parties aux thèmes secondaires.
- Il doit être logique et cohérent : il suit une ligne directrice définie en introduction. Les parties et sous parties doivent découler le unes des autres.
- Quelques défauts à éviter :
* le plan-tiroir
* accorder trop d'importance à un thème secondaire du document
* oublier des thèmes
* les déséquilibres et les répétitions
2. La rédaction
L’introduction répond à des règles très précises :
- Elle commence par une phrase d'entrée en matière, exposant le sujet abordé par le document.
- Elle doit ensuite présenter :
* La nature du document. Quelques exemples : une loi, une constitution, un discours, une lettre (confidentielle ou ouverte), un article de journal ou de revue, un extrait de roman, des mémoires...
* L'auteur du document : reconstituer la biographie de l'auteur en ne retenant que les éléments qui permettent de comprendre le document.
* La date du document, le contexte et le destinataire : relater les circonstances auxquelles le document doit son origine ; le replacer dans le temps et parfois dans l'espace.
* Une très brève analyse du document.
* La problématique (la (ou les) question(s) soulevée(s) par les idées directrices du document) et l'annonce du plan.
Le développement doit effectuer un aller et retour permanent entre le texte (sous forme de citations) et les explications ou critiques que vous apportez. Les citations doivent être très précises : un « mot », une « expression », « début d'une phrase...fin d'une phrase ».
Vous pouvez matérialiser le plan du commentaire dans le devoir par :
- des introductions partielles au début de chaque grande partie et de chaque sous-partie : elles annoncent les points que vous allez développer dans chacune d'elles.
- des transitions entre chaque grande partie et entre chaque sous-partie : elles indiquent que l'on passe d'une partie à une autre.
La conclusion doit concentrer en quelques lignes l’essentiel du document ; elle doit aussi situer les apports du document dans le cadre général de l’historiographie du sujet pour dire en quoi il peut renforcer ou contredire telle ou telle vision historiographique (intérêt du document ; critique en termes d'exactitude et de sincérité ; portée du document).